Actualités et enjeux des normes environnementales européennes
Publié le 21 octobre 2021Le 6 juillet dernier la Commission Européenne présentait sa « nouvelle stratégie pour rendre le système financier de l’UE plus durable » accompagnée de sa « nouvelle norme en matière d’obligations vertes ». Dans ce contexte, le cadre de référence se décline en 3 objectifs :
- Réorienter les flux de capitaux vers des investissements durables,
- Intégrer la durabilité dans la gestion des risques,
- Favoriser la transparence et une vision de long terme.
En pratique, les agents économiques ont vu éclore 3 nouveaux projets dont l’application plus ou moins proche interroge. Rapide tour d’horizon de ces normes et de leurs implications :
Sustainable Finance Disclosure Reporting – Règlement Disclosure (SFDR)
Objectifs : imposer des obligations de reporting uniforme en matière de durabilité
Périmètre : acteurs des marchés financiers et conseillers financiers européens ou disposant de filiale en Europe.
Impacts : les acteurs financiers devront publier les politiques de mitigations et d’engagement ainsi qu’une série d’indicateurs normés sur leur portefeuille. L’obligation de communication portera sur 14 indicateurs obligatoires sur tous les secteurs, des indicateurs sectoriels spécifiques et des indicateurs additionnels (au moins un pour l’environnement et un pour le social).
Mise en application : échelonnée en 2 phase :
- phase 1 en 2022 sur les données 2021 en se limitant aux risques d’incidence négative importante sur la valeur d’un investissement,
- phase 2 en 2023 sur les données 2022 en intégrant les incidences négatives des décisions d’investissements sur les facteurs de durabilité.
Taxonomie Verte
Objectifs : classifier les modèles d’affaire et apprécier la performance durable de manière normée.
Périmètre : entreprises soumises à la déclaration de performance extra-financière actuelle.
Impacts : les entités impactées décomposent leurs activités en fonction de leur éligibilité et de l’alignement de celles-ci avec les ODD. Les entités dont les activités ne sont pas éligibles ne disposent pas de l’opportunité de communiquer de manière élargie sur ces thématiques et sont donc pénalisées par le marché.
Mise en application : étalée en 3 temps :
- en 2022 sur les données 2021 pour la seule identification des activités éligibles,
- en 2023 sur les données 2022 en ajoutant le niveau d’alignement des activités éligibles aux ODD relatifs à l’atténuation et à l’adaptation au changement climatique,
- en 2024 sur les données 2023 en incorporant les 4 derniers ODD.
Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD)
Objectifs : améliorer la transparence du reporting en matière de durabilité
Périmètre : Toutes les entreprises cotées sur des marchés réglementées européens (hors micro-entreprises) ainsi que les grandes entreprises européennes répondant à 2 des 3 critères :
- > 250 salariés
- > 20 m€ de bilan
- > 40 m€ de CA
Impacts : la CSRD va remplacer les obligations nationales en matière de DPEF et harmoniser les publications européennes. Si la nature des informations à publier ne devrait pas être trop impactée en France, le périmètre d’application sera élargi et la digitalisation de la communication nécessitera de s’attaquer au sujet de manière anticipée.
Mise en application : Première publication début 2024 sur la base de données 2023 et selon des modalités qui seront définies en 2022.
La SFDR et la CSRD vont toucher des publics différents, le monde des acteurs financiers pour la première et celui des entreprises pour la seconde, mais devraient se rapprocher afin de donner un niveau d’information comparable. Cette harmonisation se fera au travers des concepts (double matérialité et durabilité notamment) comme des indicateurs. La taxonomie trouvera alors toute sa place en offrant un socle commun.
Compte tenu du calendrier et des impacts sur les reporting des entreprises, il est essentiel que les entreprises mettent en place dès à présent une stratégie à laquelle s’adossera un processus robuste en vue de la collecte et présentation des données. Le besoin d’accompagnement, que ce soit en matière normative ou technique, va très vite se faire sentir.
Ces différentes normes toucheront un nombre croissant d’acteurs économiques, européens ou non, et certaines auront pour effet de faciliter, ou à l’inverse de complexifier, l’accès à de nouveaux financements. Que ce soit via des levées de dettes ou bien des financements de marché, la performance extra-financière sera bientôt autant scrutée que son aînée la performance financière. A ce sujet, la mise en place d’un cadre normatif européen entourant les obligations vertes (« green bonds ») attendu très prochainement va encore renforcer la transition vers une finance durable. Les émetteurs de dettes qualifiées d’« Obligation européenne verte » devront faire attester par un examinateur externe le fléchage des fonds levés vers des projets durables.
Si les normes durables ont le vent en poupe, les standards à caractère social ne sont pas en reste et devraient voir le jour prochainement. Il est donc critique que les organisations s’approprient les enjeux environnementaux afin d’être prêtes pour le volet social.
Les auteurs
Aubrun