Prendre en compte les enjeux climatiques dans l’arrêté 2023

Publications Publié le 13 février 2024

En mars 2023, l’IASB a initié un projet relatif aux « Risques liés aux changements climatiques dans les états financiers ». A l’issue d’une consultation menée entre mars et août 2023, l’IASB s’est réuni en septembre et a décidé d’élaborer des exemples d’application des IFRS et, éventuellement, de modifier certaines de ses normes pour clarifier quelques points.

1. Un sujet d’actualité en Europe et en France

En Europe et plus spécifiquement en France, le traitement dans les comptes des enjeux climatiques fait l’objet d’une attention particulière. A titre d’exemple, dans deux décisions récentes[1], l’autorité européenne des marchés financiers a conclu que les émetteurs n’avaient pas respecté le référentiel comptable IFRS et plus spécifiquement qu’ils n’avaient pas partagé suffisamment d’information sur la prise en compte des risques climatiques dans les tests de dépréciation.

Dans la lignée de ces décisions, l’AMF, lors de la publication de ses recommandations pour la clôture des comptes 2023, a mis en avant la nécessité de considérer lors de cet exercice les « Effets des changements environnementaux et des engagements des sociétés sur les états financiers ». L’AMF précise d’ailleurs que les entreprises pourront prendre en compte le coût potentiel des quotas de gaz à effet de serre, notamment dans le cadre des tests de dépréciation.

2. Faire évoluer concrètement les tests de dépréciation

Même si à ce stade, les risques associés au changement climatique ne sont pas considérés par la majeure partie des entreprises comme des indicateurs de perte de valeur en tant que tels, leur prise en compte dans les tests de dépréciation peut cependant s’effectuer à plusieurs niveaux :

  • Dans les prévisions de performance : qu’il s’agisse de compresser les volumes futurs en anticipant un déport des consommateurs vers des activités plus durables ou bien en réduisant les marges du fait de l’intégration du coût du CO2 dans les prévisions.
  • Dans les prévisions d’investissements : la transition climatique impliquera pour de nombreuses sociétés de réaliser de nouveaux investissements. Difficile de toujours être en mesure de les chiffrer à ce jour, pour autant ils seront nécessaires, soit pour remplacer les actifs actuels dépassés par ces enjeux soit pour explorer de nouvelles solutions plus durables.
  • Dans les paramètres financiers : pour apprécier les incertitudes, lorsqu’il est difficile d’estimer les effets sur les flux opérationnels futurs, une solution peut consister à intégrer dans le taux d’actualisation de ces flux une prime de risque spécifique. Qu’il s’agisse d’une « prime d’incertitude » ou d’une « prime de risque de transition », celle-ci viendra pondérer des prévisions établies selon des hypothèses actuelles.
  • Dans la durée de vie des actifs : plutôt que de projeter à l’infini un plan d’affaires dont l’évolution est incertaine, le plafonnement de la durée des projections ou bien la prise en compte d’un taux de croissance limité de l’activité peut être une solution pertinente.

Enfin, même si les exemples listés ci-dessus mènent tous à des réductions de valeur, il convient de garder à l’esprit que les enjeux climatiques peuvent aussi être des opportunités pour certaines entreprises. En effet, que ce soit par un positionnement plus durable que celui de ses concurrents ou bien par une capacité à se projeter dans de nouvelles activités, les défis climatiques auxquels nous allons collectivement faire face peuvent s’avérer porteurs de valeur.

3. Prendre en compte ne suffit plus, il faut désormais communiquer

Comme le montre la seconde décision de l’ESMA citée précédemment, la prise en compte des risques climatiques dans la conduite des tests de dépréciation ne suffit pas, il faut également fournir une information détaillée sur les impacts et effets attendus. Cet exercice de transparence peut alors prendre plusieurs formes. A minima, la société peut énoncer la prise en compte de ces risques dans les tests de dépréciation en cohérence avec les informations et engagements extra-financiers publiés par ailleurs.

Ensuite, il peut être pertinent de préciser les effets financiers des risques climatiques dans les estimations comptables. A ce titre, partager plusieurs scenarii, avec ou sans prise en compte de ces risques, pourrait permettre aux lecteurs des états financiers de comprendre l’importance de l’exposition à ces risques. Enfin, des analyses de sensibilité pourraient également être partagées pour faciliter la perception de l’exposition financière de la société aux risques climatiques.


[1] Décisions EECS/0123-07 – Climate risk disclosures in impairment tests et EECS/0123-08 – Climate risk disclosures in financial statements

Dans le cadre de la clôture des comptes 2023, et très certainement celles à suivre, les impacts des enjeux climatiques sur les états financiers devront être surveillés.

La connectivité des domaines financiers et extra-financiers allant grandissante, les sociétés devront poursuivre leurs efforts de cohérence et de communication associée.

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